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Le parti libéral démocrate au pouvoir au Japon est confronté à une crise politique sans précédent à la suite d’allégations de détournement de fonds provenant de collectes de fonds. Les procureurs ont ouvert des enquêtes sur de nombreux ministres du parti, ce qui risque de bouleverser le paysage politique japonais.

Le Parti libéral démocrate (PLD) au pouvoir du Japon est au centre d’un scandale politique « unique en son genre », après que le ministère public de Tokyo a annoncé en décembre 2023 l’ouverture d’une enquête sur des allégations d’abus dans l’utilisation de dons destinés à la collecte de fonds. À la suite de ce scandale, la cote de popularité du gouvernement est tombée à environ 20 %, la plus basse depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. En conséquence, le PLD a démis quatre ministres de leurs fonctions et trois autres ont présenté leur démission, dont le secrétaire général du parti à la Diète nationale japonaise.

Le scandale a éclaté lorsque le parti communiste d’opposition a publié un rapport dans le journal de son parti détaillant l’abus par le PLD d’une faille dans les lois sur les dons électoraux du pays. Un professeur d’université a pris connaissance de ce rapport et, à la suite de son examen, a demandé au procureur général de Tokyo d’ouvrir une enquête.

Officiellement, il est illégal pour les entreprises de faire des dons directement à un seul fonctionnaire, mais elles peuvent acheter des billets pour des événements de collecte de fonds. Les membres du parti se voient attribuer un quota de billets à vendre, en fonction de leur ancienneté, et tout billet vendu au-delà de ce quota est conservé par le membre lui-même (ce que l’on appelle un « kickback »). Les Kickbacks sont légaux au Japon, s’ils sont correctement déclarés sur les impôts d’un individu. Toutefois, selon le rapport du parti communiste, le PLD a omis de déclarer plus de 3,5 millions de dollars de pots-de-vin au cours des cinq dernières années.

Le PLD est divisé en plusieurs factions. La plus importante a été fondée par l’ancien Premier ministre Shinzo Abe, aujourd’hui décédé, et est toujours désignée sous le nom de la faction Abe. À elle seule, cette faction aurait reçu 3,5 millions USD de pots-de-vin non divulgués, soit le montant le plus élevé de tout le PLD. D’autres factions, comme celle du Premier ministre Kishida, ont également reçu des pots-de-vin allant de 14 000 à 706 000 USD.

En réponse à cette nouvelle, Kishida a officiellement quitté sa propre faction le 7 décembre 2023 et a également annulé toutes les festivités du PLD pour le Nouvel An, un jour férié important au Japon. Le Premier ministre Kishida a fait l’objet de critiques supplémentaires à la suite d’une réaction tardive aux tremblements de terre et au tsunami qui s’en est suivi dans la région de Noto, le 1er janvier 2024, qui ont tué environ 221 personnes et en ont déplacé 20 000 autres. Bien qu’il ait approuvé un budget de 32 millions de dollars pour répondre aux catastrophes, le gouvernement de Kishida a été accusé d’être trop lent alors que de nombreuses zones restent isolées et incapables de recevoir de la nourriture et des resources.

Le 12 décembre, l’opposition au sein de la Diète nationale a proposé un vote de défiance à l’encontre du secrétaire général du cabinet, Yoshimasa Hayashi, membre de la faction d’Abe et principal coordinateur entre les pouvoirs législatif et exécutif. Le même jour, le PLD a annoncé qu’il remplacerait tous les ministres membres de la faction Abe au sein du cabinet et de l’administration, y compris les ministres de l’économie, de l’agriculture, des affaires intérieures et des communications. Au total, neuf ministres devraient être remplacés.

Les procureurs ont commencé à enquêter sur ces allégations et ont perquisitionné les bureaux de la faction Abe. Aucun parti politique japonais n’a fait l’objet d’une telle perquisition depuis plus de 20 ans. Le 7 janvier, les enquêteurs ont arrêté Yoshitaka Ikeda, membre de la Diète nationale, parce qu’ils craignaient qu’il ne falsifie ou ne détruise des preuves alors qu’il aurait reçu 333 000 USD de dons détournés,. Yoshitaka est le premier à être arrêté dans le cadre de l’enquête.

Le PLD a gouverné le Japon presque sans interruption depuis sa création en 1955. Le parti n’a perdu sa position de leader qu’à deux reprises : de 1994 à 2005 et de 2009 à 2012. Ce dernier scandale représente la plus grande menace pour la gouvernance du PLD dans l’histoire récente. Le parti a déjà connu des scandales par le passé, le dernier remontant à 2010. Toutefois, avec un taux d’approbation de l’opinion publique avoisinant les 20 %, la position du parti est précaire.

La Diète nationale s’est réunie à nouveau fin janvier et restera en session jusqu’au 23 juin. Les procureurs ont annoncé leur intention de terminer l’enquête avant le début de la session afin d’éviter de perturber le processus politique. Cependant, l’enquête est toujours en cours. En fonction du verdict, la faction Abe pourrait disparaître complètement, ce qui bouleverserait le paysage politique.

Actuellement, le principal parti d’opposition, le Parti constitutionnel démocratique, n’est qu’à trois points du PLD dans les sondages d’opinion et un nombre croissant d’électeurs japonais s’identifient comme non partisans. Il s’agit là d’un changement sans précédent à l’encontre du PLD. Dans ce contexte, les retombées du scandale pourraient bouleverser complètement la force la plus dominante de la politique japonaise.

Photo : Tokyo, le Premier ministre japonais Fumio Kishida tient une conférence de presse à Tokyo, au Japon, le 13 décembre 2023. Le Premier ministre japonais Fumio Kishida a évincé jeudi les quatre ministres de la plus grande faction du parti au pouvoir, alors qu’il cherche à limiter les dégâts suite à un scandale de collecte de fonds politiques, ont rapporté les médias locaux. © IMAGO / Xinhua
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