En octobre 2024, Kazan, la capitale de la République du Tatarstan en Russie, est devenue l’épicentre de la politique et de la diplomatie mondiales. Le XVIe sommet des BRICS, qui s’est tenu sous la devise « Renforcer le multilatéralisme pour un développement mondial équitable et sécurisé », a rassemblé les dirigeants des plus grandes économies émergentes du monde, de nouveaux partenaires et des représentants d’organisations internationales. Le sommet n’était pas seulement un événement important pour la Russie en tant que présidente de l’association, mais aussi une étape importante dans le renforcement du rôle des BRICS dans un monde multipolaire.
Murat Gibadyukov
27 novembre 2024
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Les BRICS (du nom des pays fondateurs : Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) étaient à l’origine une association économique de grands pays en développement, mais ils se sont rapidement transformés en une puissante plateforme politique et économique. Les pays du BRICS représentent plus de 40 % de la population mondiale et environ un quart du PIB mondial. À l’heure où l’économie mondiale subit de sérieuses transformations et où la confiance dans les institutions internationales traditionnelles telles que l’ONU et le FMI diminue, les BRICS sont en train de devenir un centre de pouvoir alternatif.
Le succès des BRICS réside dans leur capacité à unir des pays aux histoires, cultures et modèles économiques différents autour d’objectifs communs : le développement durable, l’évitement des sanctions unilatérales et la construction d’un ordre international juste.
Pour la première fois, le sommet s’est tenu dans un format élargi BRICS Plus, ouvrant ses portes aux pays partenaires. Des délégations de 35 pays et de six organisations internationales, dont des dirigeants d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine et du Moyen-Orient, ont participé aux discussions. Ce format d’ouverture est devenu un outil permettant de renforcer l’engagement avec les États du Sud qui cherchent des voies de développement indépendantes.
Bien qu’aucun nouveau membre n’ait rejoint les BRICS lors du sommet, le concept de « pays partenaires » a été introduit. Le statut de partenaire a été accordé à l’Algérie, au Belarus, à la Bolivie, à Cuba, à l’Indonésie, au Kazakhstan, à la Malaisie, au Nigeria, à la Thaïlande, à la Turquie, à l’Ouganda, à l’Ouzbékistan et au Viêt Nam, ce qui souligne l’intérêt croissant pour cette association.
Résultats du sommet : Déclaration de Kazan
La réunion de trois jours s’est achevée par la signature de la déclaration de Kazan, un document stratégique qui reprend les principales réalisations et initiatives du sommet. Ce document réaffirme l’engagement des pays du BRICS en faveur de ce qui suit
- La formation d’un ordre mondial multipolaire fondé sur le droit international ;
- S’opposer aux sanctions illégitimes et aux diktats des centres de pouvoir unipolaires ;
- Renforcer la coopération financière, y compris la transition vers des règlements en monnaies nationales.
Lors du sommet de Kazan, la Russie a proposé des initiatives économiques clés visant à renforcer la coopération entre les pays BRICS. L’une d’entre elles est le développement du système de dépôt transparent des BRICS pour la comptabilité des titres, qui réduirait la dépendance vis-à-vis des systèmes financiers mondiaux. En outre, la création d’une bourse capable de stabiliser les prix et de protéger les marchés alimentaires des pays membres a été discutée.
Une attention particulière a été accordée au développement du système de règlement des paiements des BRICS. Ce système simplifiera les règlements transfrontaliers et offrira des conditions pratiques pour les transactions financières, contribuant ainsi à la dédollarisation et au développement de l’économie numérique. Ces initiatives soulignent l’engagement des BRICS à construire une infrastructure économique indépendante et durable.
Une autre idée importante est la formation d’une plateforme pour le commerce des métaux précieux et des diamants, qui aidera à développer les marchés nationaux et à minimiser l’impact des facteurs externes. Une plateforme d’investissement a également été proposée pour devenir un outil permettant de lever des capitaux pour des projets d’infrastructure et industriels dans les pays du bloc BRICS.
Pour la Russie, le sommet a été non seulement un succès diplomatique, mais aussi l’occasion de démontrer ses capacités à organiser des événements internationaux. Grâce au soutien du gouvernement du Tatarstan et de la fondation Roscongress, le sommet s’est déroulé au plus haut niveau.
Shamil Gafarov, vice-premier ministre du Tatarstan, a noté que Kazan avait une fois de plus prouvé qu’elle était prête à accueillir des événements d’envergure mondiale. Outre l’agenda politique et économique, le sommet est devenu un exemple de responsabilité sociale : les organisateurs ont fait don d’équipements et de matériel aux institutions pour les enfants de la région.
La culture comme outil de diplomatie
Le sommet de Kazan a été un événement non seulement politique mais aussi culturel. Un riche programme a été organisé pour les délégués : excursions, représentations théâtrales et expositions aux couleurs nationales de la Russie et du Tatarstan. L’exposition « Mosaïque ethnographique » a permis aux participants de découvrir le patrimoine culturel des pays BRICS, tandis que le projet « Univers BRICS » a présenté des photographies uniques prises par les cosmonautes russes.
L’exposition Mosaïque ethnographique.
Source : Kommersant, Artemii Shumatov
L’un des principaux événements a été l’exposition Made in Kazan, qui a permis de présenter les développements innovants du Tatarstan. Ce succès a servi de base au déplacement de l’exposition au Forum économique international de Saint-Pétersbourg en 2025.
Agenda mondial : conflits et défis
Les dirigeants participants se sont concentrés sur les défis mondiaux, notamment le conflit en Ukraine et dans la bande de Gaza, ainsi que les crises au Soudan et en Afghanistan. Les participants ont unanimement souligné l’importance d’un règlement pacifique fondé sur le dialogue, rejetant les approches et les interventions unilatérales.
Le président russe Vladimir Poutine a noté que la clé de la stabilité mondiale reste le respect des principes de la Charte des Nations unies. « Les BRICS sont une plateforme de dialogue égalitaire, où chaque voix est importante », a-t-il souligné.
Les BRICS, un acteur mondial
Le XVIe sommet de Kazan a confirmé que les BRICS ne sont plus seulement une association ou un club d’intérêts. « Les BRICS ne sont plus seulement une plateforme de dialogue, mais une organisation puissante capable de structurer la politique mondiale sans diktats extérieurs. Nous nous engageons à renforcer l’indépendance financière, à élargir les opportunités d’investissement et à soutenir la croissance des économies du Sud et de l’Est », a déclaré Vladimir Poutine.
L’importance de l’association s’accroît d’année en année. L’augmentation du nombre de ses membres, le développement des liens économiques et culturels et la poursuite de la multipolarité font des BRICS l’une des plateformes clés pour la formation d’un ordre mondial juste.
Le sommet de Kazan n’est pas seulement une réunion de dirigeants, c’est une nouvelle étape vers la construction d’un monde où les intérêts de tous les participants à la communauté mondiale sont respectés.